Certes, si tu le veux mériter!
Certes, Si tu le veux mériter, mon fils, oui,
Et voici, laisse aller l'ignorance indécise
De ton coeur les bras ouvert de mon église
Comme la guêpe au lis épanouie.
Approche-toi de mon oreille. Epanches-y!
L'humiliation d'une brave franchise.
Dis-moi tout sans un mot d'orgueil ou de reprise
Et m'offre le bouquet d'un repentir choisi.
Puis franchement et simplement vient à ma table,
Et je t'y bénirai d'un repas délectable
Auquel l'ange n'aurait lui-même qu'assisté,
Et tu boira le vin de la vigne immuable
Dont la force, dont la douceur, dont la bonté
Feront germer ton sang à l'immortalité.
Puis, Va! Garde une foie modeste en ce mystère
D'amour par quoi je suis ta chaire et ta raison,
Et surtout revient très souvent dans ma maison,
Pour y participer au Vin qui désaltère,
Au pain sans qui la vie est une trahison,
Pour y prier mon père et supplier ma mère
Qu'il te soit accordé, dans l'exile de la terre
D'être l'agneau sans cri qui donne sa toison,
D'être l'enfant vêtu de lin et d'innocence,
D'oublier ton pauvre amour propre et ton essence,
Enfin, de devenir un peu semblable à moi
Qui fut, durant les jours d'Hérode et de Pilate
Et de Judas et de Pierre, pareil à toi
Pour souffrir et mourir d'une mort scélérate!
Et pour récompense ton zèle en ces devoirs
Si doux qu'ils sont encore d'ineffables délices
Je te ferai goûter sur terre mes prémices
La paix du coeur, l'amour d'être pauvre, et mes soirs
Mystiques, quand l'esprit s'ouvre aux calmes espoirs
Et croit boire, suivant ma promesse, au Calice
Eternelle, et qu'au ciel pieux la lune glisse
Et que sonnent les angélus roses et noires
En attendant l'assomption dans ma lumière,
L'éveil sans fin dans ma charité coutumière,
La musique de mes louanges à jamais,
Et l'extase perpétuelle et la science,
Et d'être en moi parmi l'aimable irradiance
De tes souffrances, enfin miennes, que j'aimais!